Le scénariste Wilfrid Lupano vient de refuser le titre de chevalier des arts et lettres que lui avait décerné le ministre de la culture. Et il s’en explique, de façon politique et cinglante.

Le dernier éclat du genre remonte à 2013, lorsque Jacques Tardi refusa avec fracas la Légion d’honneur que la ministre de la Culture de l’époque, la socialiste Aurélie Filippetti avait jugé judicieux de lui proposer. Cette fois, c’est le scénariste Wilfrid Lupano qui se montre tout aussi cinglant, à l’égard de l’actuel ministre de la Culture (de droite ou macronien, on ne sait plus trop) Franck Riester, qui vient de lui adresser “à (sa) plus grande surprise” un courrier l’informant que lui a été décerné le grade de chevalier des arts et lettres.
Là encore, Le créateur des Vieux Fourneaux refuse avec panache cet “honneur”, avec une lettre publiée sur les réseaux sociaux et sur son blog de Médiapart. Cette distinction, précise-t-il d’entrée ” “a l’inconvénient, monsieur le ministre, d’être remise par un représentant politique. Or, comment accepter la moindre distinction de la part d’un gouvernement qui, en tout point, me fait honte ?” Honte, liste-t-il ensuite notamment en raison de sa politique répressive, de son approche des migrants, de sa politique de destruction des services publics, etc.
Wilfrid Lupano est certes l’un des plus talentueux scénariste de bande dessinée actuel, à qui l’on doit notamment la superbe trilogie Communardes, l’ironique et loufoque saga du Traquemage, la petite merveille de fantasy poétique qu’est Azimut ou, bien sûr, les Vieux Fourneaux.
Et sûrement que le ministre, ou, plus sûrement, l’un de ses conseillers, dans la parfaite logique économiste et financière de la start-up nation macronienne s’est-il penché sur les résultats au box-office où cette dernière série cartonne. S’il avait pris la peine, plutôt, de lire les albums, avec son trio de vieux réfractaires – activiste anar, syndicaliste, aventurier – peut-être aurait-il évité sa boulette…
Lupano en conclue d’ailleurs un peu dans ses termes, en assurant que : “Vous le voyez, nous avons peu de points communs, politiquement. Et dans un monde où les distinctions culturelles seraient remises par le milieu culturel lui-même, sans intervention du politique, j’aurais accepté celle-ci avec honneur et plaisir. Mais il n’y a pas de geste politique qui ne soit aussi symbolique, et je sais déjà que si un jour j’atteins l’âge avancé où on prend son pied à exhiber ses breloques, j’aurais bien peu de plaisir à me rappeler que celle-ci me fut remise par le représentant d’un gouvernement dont j’aurais si ardemment souhaité la chute et la disgrâce.”
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