Azimut, tome 5: derniers frimas de l’hiver, Wilfrid Lupano (scénario), Andreae (dessin). Editions Vents d’Ouest, 56 pages, 14,50 euros.
A la fin du tome précédent, l’an dernier, la plupart des personnages fuyaient la cité de Baba Musir. Mais un nouveau retentissant chagrin d’amour de Polo a provoqué une immense vague glaciaire qui frappe l’ensemble du territoire… sauf le Petitghistan qui se voit épargné. Paradoxalement, cela oblige le pays à revoir ses plans de conquête du monde, puisqu’il devient à l’inverse le lieu de toutes les migrations ! Manie Ganza, pendant ce temps, doit rendre des comptes à la Banque du Temps. Et le baron chagrin n’a pour sa part pas survécu au froid, mais la mort de celui qui devait vivre jusqu’à la fin des temps signifie-t-elle donc que celle-ci est arrivée ?
C’est en tout cas la fin de l’aventure (ou du moins de ce “premier cycle”) pour Manie Ganza, la voleuse de chrones cherchant à arrêter le temps pour conserver sa beauté intacte ainsi que pour tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre se sont lancés à sa poursuite : le peintre Eugène, son soupirant éternel, l’explorateur Eugène de La Pérue, le major Oreste Picote, le professeur Aristide Breloquinte, la méchante reine d’Ether (mère jalouse de Manie) et même Polo (le lapin qui marquait le pôle nord et dont les déplacements sont à la source de tous les bouleversements d’Azimut).
Ce dernier épisode est à l’image de la série développée par Wilfrid Lupano et Andreae depuis sept ans (et cinq albums) : poétique, inventif, graphiquement dynamique et superbe. Et la fin, ouverte ou tout du moins susceptible de plusieurs interprétations, est au niveau d’exigence et de subtilité exprimée par cette saga depuis son premier épisode.
Complexe et exigeante derrière sa fantaisie, Azimut a multiplié les personnages et les intrigues parallèles sans jamais se perdre. Cette série a développé un univers loufoque – mais profondément cohérent – où des oiseaux mécaniques détiennent le secret du temps et pondent des créatures improbables, où des nobles se repaissent des massacres, ou des dieux en forme de colonne de sable humanoïde peuvent s’émouvoir du destin des humains, ou le Pôle nord est incarné par un lapin !
Et cet univers a été retranscrit superbement par le dessin magnifique d’Andreae. Wilfrid Lupano, de son côté, soigne particulièrement bien les dialogues, tout en abordant comme dans Les Vieux Fourneaux – plus ouvertement dans ce cinquième tome – quelques réflexions bien senties sur l’actualité, comme ici sur la question des migrants ou des guerres de conquête.
Bref, vraie réussite narrative et graphique dans ce registre rare de l’univers fantaisiste, Azimut se confirme comme le digne successeur d’Horologiom, la magnifique saga de Fabrice Lebeault qui avait marqué les années 1990.
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