Girls’ Last Tour (série en cours), Tsukumizu (scénario et dessin). Edition Omaké Manga, 160 pages, 7,50 euros.
La civilisation s’est éteinte il y a de nombreuses années. Le monde ne se résume plus qu’à des villes dévastées et des machines inutiles. Chito et Yuri sont seules et errent sans véritable but dans les décombres à bord de leur kettenkrad, ce modèle d’autochenille produit pour l’armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale.
Les deux jeunes filles ont grandi dans ce monde, sans savoir comment elles ont pu survivre par elles-mêmes, sans connaître le monde d’avant. Elles déambulent sans comprendre véritablement tout ce qu’elles voient, à la recherche d’un toit et de nourriture. Elles ne savent même pas ce qu’est ce poisson pêché par hasard qu’elles finiront pas manger.
Leur périple dans ce monde sans vie est, pour elles, l’occasion de se poser de nombreuses questions sur l’existence et la vie que menaient leurs ancêtres, mais aussi sur le futur…
Scénarisé et dessiné par Tsukumizu, Girl’s Last Tour est une douce dystopie qui nous plonge dans un monde post-apocalyptique ravagé par les guerres. Un univers sombre éclairé par les pérégrinations et les explorations de deux jeunes filles au caractère opposé. Yuri, la grande blonde, insouciante, ne pense quasiment qu’à satisfaire sa faim. Chito, la petite brune, est plus mesuré, c’est elle qui conduit l’autochenille le plus souvent en quête d’un endroit pour passer la nuit, à l’abri du froid.
Les deux amies semblent errer comme deux âmes en peine dans un décor fait de ruines et de décombres. Et où il ne semble n’y avoir plus âme qui vive à part ces deux êtres qui ne comprennent pas comment et pourquoi l’humanité a pu disparaître (la mangaka entretient d’ailleurs le mystère tout au long du premier tome). Ne restent plus que ces monceaux d’armes et de minutions qui ne servent à rien.
Dans le même genre, Girl’s Last Tour n’est pas sans rappeler Survivant, l’histoire du jeune S (de Saito) dans lequel on suit la quête effrénée d’un adolescent pour sa survie après une catastrophe naturelle mondiale. Ou encore Made in Abyss (de Tsukuhi) pour les multiples explorations et la complémentarité des héros.
Fidèle à l’esprit antimilitariste de nombreux mangaka (Nakazawa, Miyazaki…), né au lendemain des feux nucléaires à Nagasaki et Hiroshima, Tsukumizu dresse une critique en règle de la fascination (et la folie) des hommes pour les armes de destruction massive. Quoi de mieux que le regard innocent et contemplatif de deux jeunes filles pour faire passer son message.
Le style graphique « kawaii » ou mignon de la mangaka contraste lui aussi avec le scénario imaginé. Avec ces nez non dessinés et ces visages ronds, on se prend finalement très vite d’affection pour les deux personnages principaux plein de naïveté.
La série compte six volumes, au Japon, elle a gagné le prix Seiun du meilleur manga de science-fiction en 2019. En attendant la sortie du tome 2 en avril prochain, il est possible de voir (ou revoir) l’anime sur la plateforme Wakanim avec notamment une bande-son qui vaut le détour.
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