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Destins parallèles et amours croisés

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Destins parallèles, elle – lui, tome(s) 1, Daisuke Imai (scénario et dessin). Editions Komikku, 224 pages, 8,5 euros.

S’attaquer à la lecture de Destins parallèles de Daisuke Imai, l’une des dernières trouvailles manga des éditions Komikku, c’est vivre une expérience originale et, il faut bien l’avouer pour ma part, inédite. Originale car il n’y a pas un mais deux premiers tomes, racontant chacun une histoire du point de vue des personnages principaux : Yukichi, étudiant à lunettes coincé et Chihiro, étudiante à la timidité maladive.
Deux façons de voir les choses, deux perspectives qui peuvent déstabiliser au départ (d’abord parce que l’on ne sait pas vraiment pas quel tome commencer) mais qui ne laissent pas indifférent.

Le récit prend place à Kyôto (Japon), de nos jours. Etudiant à l’université de Rakuhoku, Yukichi achète dans une brocante un joli petit miroir avec des feuilles d’érable dessus. Il souhaite l’offrir un jour à son âme sœur. Cet objet, qui appartient en réalité à Chihiro, lui a été vendu par inadvertance par la grand-mère de la jeune fille. Ce miroir, Chihiro y tient comme à la prunelle de ses yeux car il lui fut offert, enfant, par sa maman aujourd’hui décédée. Un souvenir précieux qui va lui revenir plus vite que prévu et de manière inattendue…
Revêtue d’un kimono traditionnel, la jeune étudiante participe à une cérémonie de rentrée universitaire lorsqu’elle est bousculée accidentellement par Yukichi. Un choc qui sonne comme un coup de foudre… Après avoir recouvré ses esprits, Chihiro aperçoit au sol son miroir perdu et, contre toute attente, le remet au jeune homme. Troublé par la beauté de Chihiro, Yukichi décide de lui en faire cadeau. Le début d’une histoire d’amour semée d’embûches car Yukichi est déjà ou croit être amoureux d’une autre étudiante, la belle et manipulatrice Hinata…

« Les histoires d’amour finissent mal en général », chantaient Les Rita Mitsouko à la fin des années 1980. On ne l’espère pas pour Yukichi et Chihiro qui semblent réellement faits l’un pour l’autre. C’est en tout cas ce qui ressort de ce(s) très beau(x) premier(s) tome(s), empreint(s) de poésie et de délicatesse. Le pari tenté par le créatif mangaka Daisuke Imai, connu notamment pour Sangsues était osé mais il est amplement réussi. Le tour de force de ces deux premiers tomes sentimentaux est de montrer parfois la même scène au lecteur mais avec des sensibilités féminines (« Elle » pour Chihiro) et masculines (« Lui » pour Yukichi) différentes.

En réalisant deux séries distinctes (de trois tomes chacune) racontant la même histoire mais d’un point de vue différent, l’auteur parvient à faire naître des sensations visuelles assez inédites chez le lecteur. Une impression de déjà-vu (en fonction du tome que l’on a lu en premier) qui n’est pas désagréable. Cet effet renvoie à un autre manga Made in heaven, de Sakurai Ami, où chaque tome est lu à travers le point de vue d’un personnage mais aussi aux films 500 jours ensemble de Marc Webb et The disappearance of Eleanor Rigby (« Him » et « Her ») de Ned Benson.

Les scènes où l’on voit Yukichi et Chihiro ensembles sont dessinées à partir d’angles différents, le mangaka prenant soin de ne pas les copier-coller, préservant ainsi la singularité des deux séries. Très subtil. Certaines scènes sont d’ailleurs bluffantes comme la ou plutôt les deux double-pages qui montrent nos deux étudiants se croiser pour la première fois dans une brocante. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si elles ont été choisies pour illustrer la quatrième de couverture.
En parlant de couverture, quand on les met côte à côte, les deux tomes forment un beau dessin représentant Chihiro et Yukichi sur le pont de Kyôto. Bien pensé et même bien vu de la part de Daisuke Imai.

Si l’on s’attache très tôt aux personnages principaux décrits, c’est sans doute aussi parce qu’ils évoluent dans la magnifique région de Kyôto. Comme dans Sangsues, les décors et les paysages sont formidablement dessinés, à l’image du temple du village pittoresque et atypique de Kibune où Chihiro et ses amis (Sosuke et Kaho) vont, chacun, rédiger un vœu d’amour. Les expressions sont également très joliment dépeintes. Notamment chez Yukichi qui cache derrière son apparente assurance un cœur d’artichaut et une touchante fragilité.
Autre belle réussite, l’explosion de sentiments qui surgit après la rencontre de nos deux étudiants qui vont progressivement apprendre à se connaître (et à s’aimer) à travers des scènes romantiques, poignantes et parfois cruelles. Car l’amour ce n’est pas si simple… Deux séries qui ne sont donc pas de trop pour nous l’expliquer et nous le faire partager.

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