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Fièvre jaune pour le ciné-bis italien

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Midi-Minuit, Doug Headline (scénario), Massimo Semerano (dessin). Editions Dupuis, coll. Aire libre, 176 pages, 22 euros.

1999 à Paris. A la sortie d’une séance où ils ont vu un double-programme cinéma-bis italien, deux cinéphiles, Christophe Lemaire et François Renard, décident d’aller réaliser l’interview du cinéaste Marco Corvo, mythique metteur en scène vivant reclus chez lui depuis vingt-cinq ans et ne recevant personne. Il fera pourtant exception pour ses deux fans, introduits auprès du maître par un correspondant italien. Mais les deux journalistes en herbe sont loin de s’imaginer que cette virée cinéphile va mettre leur vie en jeu. Car peu après leur arrivée à Bologne, une série de meurtres sanglants se déclenche. Les victimes sont retrouvées les yeux crevés ou ensevelis sous des monceaux de pellicule. Tous sont tous des critiques de cinéma ayant méprisé le travail de Corvo. Et bientôt, les deux jeunes Français vont aussi à voir affaire avec ce mystérieux tueur masqué…

Tout est hautement référentiel dans ce beau thriller, hommage dans la forme comme dans le fond à un sous-genre longtemps mésestimé, le « giallo », cette forme de triller sanglant et esthétisant, typiquement italien, dont les maîtres furent Mario Bava et Dario Argento et qui tire son nom (« jaune ») de la couverture des polars populaires italien, comme la série noire en France.

Le titre de l’album, Midi-Minuit, renvoie à la salle de ciné parisienne du même nom, en fonctionnement jusque dans les années 1970, mais aussi à une revue de ciné fantastique homonyme des 60′.
Le nom des protagonistes ensuite, est un clin d’œil à deux journalistes (Christophe Lemaire et François Cognard) du mythique magazine Starfix du début des années 1980, auquel collabora aussi Doug Headline.
Autre hommage, le passage incessant enfin entre la réalité et la fiction, entre des anecdotes réelles de l’histoire du cinéma populaire italien d’après-guerre et une intrigue romanesque inspirée du genre. Un effet de réel renforcé par l’insertion dans l’album, de nombreux photogrammes de vrais films (la liste est précisée méticuleusement en fin de l’ouvrage). Et même le dénouement du récit, grand guignolesque et mélodramatique s’inscrit pleinement dans cette veine cinématographique longtemps méprisée. Et, de fait, ce projet était au départ un scénario de film, imaginé par Doug Headline à la sortie d’une projection de La Tarentule au ventre noir, au début des années 2000, peut être au Brady, comme dans le prologue de cet album.

Le risque, avec un tel hommage au genre et à ses fans enrichi d’une historiographie bien documentée, aurait pu être que l’histoire s’écroule sous tant de références et tourne à vide, pétrifiée par ses modèles. Mais Doug Headline lui insuffle une vraie dynamique, confortée par le dessin énergique de l’Italien Massimo Semerano, dans un style semi-réaliste au découpage très cinématographique.
De quoi ravir donc les amateurs du giallo, les nostalgiques de Starfix (même si, personnellement, j’étais plutôt de l’école du vénérable Mad Movies de Jean-Pierre Putters), tout comme les néophytes qui pourront prendre plaisir à ce polar transalpin, tout en apprenant beaucoup de chose sur cette cinématographie parallèle plus que marginale.
Un dossier, en fin d’ouvrage, richement illustré et rédigé par Doug Headline vient enrichir encore cette « anatomie d’un genre » riche et plaisante.

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