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Une si subtile analyse de l’amour

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    Philippe Vilain excelle pour décrire la passion. Son dernier roman le prouve.

 

Philippe Vilain, livre « Pas son genre », août 2011.

Parler des rapports amoureux en littérature, n’est pas chose facile. Nombreux sont ceux qui s’y sont cassé les dents et brisé le cœur. En revanche, certains excellent dans cet exercice: Stendhal, bien sûr, mais aussi Maupassant, Jacques Laurent, Michel Déon et quelques autres. Dans la jeune génération, l’excellent Philippe Vilain témoigne d’une finesse et d’une habileté rare. Il suffit de lire, parmi sa production littéraire conséquente, Pas son genre pour s’en convaincre. Il suffit également de lire son dernier roman, La fille à la voiture rouge, pour en être persuadé. Il développe un art délicat et subtil de l’analyse des relations amoureuses. (Certains de ses romans font penser, parfois, à ceux des débuts de Pascal Lainé quand celui-ci nous donnait à lire L’Irrévolution, prix Médicis 1971, et La Dentellière, Prix Goncourt 1974.) Philippe Vilain développe un style et un ton d’une élégance rare que les amateurs de Jacques Chardonne doivent, sans aucun doute, aimer.

Un très grand écrivain

Que nous conte-t-il dans La fille à la voiture rouge? L’histoire d’un couple; celle d’un homme de trente-neuf ans, issu d’un milieu modeste, et d’une très jeune femme, Emma Parker, vingt ans, fille d’un diplomate américain. Étudiante en lettres modernes, elle vit dans un luxueux appartement de Neuilly. Une jeunesse dorée. Le narrateur est homme qui doute, qui lutte contre le temps qui passe. Mais il est romancier. Et quel romancier! Emma ne résiste pas. Coup de foudre, passion entre ces deux êtres que tout pourrait opposer. Ils tissent une relation faite de légèreté, de folle tendresse et de plaisir. Tout pourrait aller si bien dans le meilleur des mondes, jusqu’au jour où Emma confie à son amant qu’à la suite d’un accident de voiture (au cours duquel elle aurait perdu son fiancé), elle a gardé une terrifiante menaçante séquelle: un hématome extra-dural dans la tête.

Celui-ci ne peut être opéré. Emma est donc en sursis: à tout moment, elle peut décéder. «D’une certaine manière, ce drame faussait la vision que j’avais d’Emma; il ne me faisait pas voir une jeune fille en elle mais une fille qui allait mourir jeune.» Et quelques pages plus loin, ces propos du héros malheureux: «Il y avait aussi qu’en lui faisant l’amour, j’avais l’impression de lui donner la mort. Si certains hommes ont le fantasme de l’infirmière, aucun n’a celui de la malade. La maladie repousse. On veut la soigner, non l’étreindre.» Puis, ce terrible constat, poignant de vérité: «Je sentais, en effet, se préciser en moi une dimension nouvelle du sentiment amoureux, sa bienveillance inconditionnelle, qui me faisait retrouver le rôle protecteur que j’avais eu, dans ma jeunesse, en assistant mon père alcoolique, puis malade, et que, par la suite, j’avais su mettre de côté dans mes relations amoureuses; c’est ainsi, en quelque sorte, qu’Emma Parker me rendait à moi-même.» Mais qui est réellement Emma Parker? On ne le dévoilera pas ici. Philippe Vilain nous surprend, nous tient en haleine. C’est un grand romancier. Un très grand écrivain. PHILIPPE LACOCHE

La Fille à la voiture rouge, Philippe Vilain ; Grasset ; 250 p. ; 19 €.

 

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