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Amour et amitié en circuit court, c’est le pied!

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De haut en bas et de gauche à droite : les chaussons canadiens au bout de mes mollets de coq; les espadrilles de ma copine blonde; les chaussons de ma copine brune.

Le dimanche 30 septembre dernier, je publiais ici même une chronique intitulée «Mais pourquoi tant d’automnes?». Dans celle-ci, je confiais que j’allais me séparer de ma fidèle Peugeot 206 verte, cabossée, 330 000 kilomètres au compteur; elle est un peu pour moi ce que la Peugeot 403 est au lieutenant Columbo. Je racontais que ses fauteuils avaient épousé les fesses voluptueuses des femmes qui sont passées dans ma vie de marquis. Et je confiais enfin que j’étais en train de faire l’acquisition d’une Dacia blanche, ce grâce aux établissements Renault Gueudet, à Amiens. Comme à mon habitude, quelques jours plus tard, je publiai ce Dessous chics sur Facebook. Il y eut des commentaires amusés. Sauf un, celui d’un confrère journaliste moraliste et pas drôle pour deux sous, qui me reprochait de m’adonner au journalisme alimentaire. Il n’avait rien compris; mon but se limitait, comme à chaque fois, à raconter une petite histoire de ma vie minuscule. Cela ne m’empêcha pas de dormir; je passais à autre chose. Mais il y a quelques jours, je reçus un mail d’une attachée de presse, Maureen, de la société Soft & Yoga, «spécialiste du chausson qui chouchoute les pieds». Dans son communiqué, elle présentait les nouveaux produits pour l’hiver 2018-2019. Il y était notamment précisé que «la gamme s’enrichit et propose désormais, en plus de son iconique chausson hydratant, des modèles relaxants». Je regarde distraitement; mon attention, telle un papillon, se pose sur la fleur de «chaussons relaxants Québec (…) naturellement relaxants grâce à une doublure intérieure dont les microcapsules [qui] libèrent au contact de la peau une huile décontractante et chauffante». «Bon Dieu, mais c’est bien sûr!» tonnai-je, comme un Raymond Souplex (le commissaire Bourrel) picard dans les Cinq Dernières Minutes. (Tu remarqueras, lectrice adulée, que mes références télévisuelles sondent toujours les reins de l’actualité la plus brûlante.) Je me disais que j’allais joindre l’utile à l’agréable: me faire envoyer une paire de chaussons neufs, et des Québécois (ah! nos bons alliés canadiens!) pour mes longues soirées d’hiver, et taquiner mon confrère moraliste qui, à coup sûr, me reprochera, une fois encore, de pratiquer un journalisme alimentaire. (Aurait-il l’intention de tenter de faire sauter ma carte de presse – numéro 43 173 – difficilement acquise en 1978 alors que je galérais dans les revues de rock à Paris, payé à coups de lance-pierre?) Je recontactai Maureen. Trois jours plus tard, je recevais un joli petit carton à la rédaction; il contenait mes pantoufles. Depuis, je les étrenne avec un vif plaisir. Elles sont effectivement douces, confortables, relaxantes. Mais j’ai tout de même l’impression de faire une légère infidélité à deux amies très chères et très mignonnes. La blonde m’avait offert mes chaussons d’été, de belles espadrilles toilées; la brune, ceux d’hiver, sombres et chauds comme ses yeux. Ce sont elles aussi, adeptes du bio, qui m’alimentent en compost. Pour boucler la boucle, il faudrait que Maureen m’envoie du compost de temps en temps. Pour résumer: amour et amitié en circuit court, c’est le pied! (Je m’adonne maintenant au journalisme plantaire, la verrue et aponévrosite de notre métier.)

Dimanche 11 novembre 2018.

 

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