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Little Big Ielsch

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À 35 ans, Julien Ielsch a arrêté sa carrière professionnelle. En formation au sein du centre de l’Amiens SC, il joue en équipe réserve en étant entraîneur adjoint des U19. Témoignage.

L’absence crée le manque et il faut bien avouer que personne n’a remplacé ou ne remplacera Julien Ielsch depuis qu’il a décidé de mettre un terme à sa carrière professionnelle. Après sa première et dernière saison en Ligue 1, il a fini par décrocher en mai: «Début avril, je commençais à être fatigué psychologiquement et physiquement. Il y avait une usure. Je ne voulais pas laisser une image négative et faire l’année de trop. J’en ai parlé à mon épouse et elle m’a suivi. Cela faisait une quinzaine d’années que j’étais dans le milieu. Elle a compris ma démarche et ma réflexion.»
Pas question de faire le combat de trop. Il décide de baisser sa garde en préparant son avenir: «J’ai eu la chance que le club me propose une reconversion. Je ne me suis pas levé un matin et en me disant «je vais arrêter et comment je vais faire pour ma famille?» J’ai pu échanger avec Patrice Descamps, le directeur du centre de formation pour continuer à jouer en équipe réserve car je ne pouvais pas arrêter de jouer du jour au lendemain. Il fallait que je continue mais à un niveau en dessous. Il a accepté et j’ai intégré le centre pour passer mes diplômes.»
Fini le haut niveau, finie la Ligue 1 et la fièvre du samedi soir. «C’était dur car j’avais créé des liens avec certains joueurs. Le jour de la reprise du stage au Touquet, ma femme a été intelligente car on est partis en vacances durant cette semaine. Cela m’a permis de couper aussi complètement. Après, je ne vais pas dire que ça me manque ou pas mais le fait d’être encore dans une structure, et de continuer à jouer, m’a permis de ne pas ressentir ce qu’on appelle ‘‘la petite mort’’. Je joue encore en N3 et je me donne à fond même s’il y a moins de strass et de paillettes.»
Pas de regrets, pas d’aigreur, Julien Ielsch assume et s’assume: «J’ai toujours eu une mentalité un peu bizarre. J’ai toujours déconné avant les matches mais une fois le coup d’envoi donné, je me mets toujours minable. En Ligue 1 ou N3, le respect se gagne toujours sur le terrain. C’est sûr que c’est plus excitant de jouer dans le chaudron à Saint-Etienne devant 40 000 spectateurs qu’à Maubeuge sur un terrain pourri devant une centaine de personnes mais l’intention est la même: il faut se mettre minable pour gagner.»
Une manière de respecter son métier. «Je pense. Je joue en N3, je prends une place et je dois montrer aux jeunes que le choix de l’entraîneur a été judicieux. Je suis un peu comme un grand frère tout en étant coach pendant la semaine. Je jongle et j’arrive à concilier les deux.»

Il prépare ainsi le BEF en étant entraîneur adjoint des U19 avec Antoine Buron: «Je suis passé d’un rythme de trois à quatre heures par jour lorsqu’on est professionnel, sans compter le travail invisible, à des journées bien remplies. J’arrive à 8h30 et je repars vers 19heures. Je ne voyais pas l’envers du décor de cette manière mais c’est passionnant. On ne compte pas nos heures et c’est ce que je recherchais aussi. Mais c’est plus complexe au niveau de la vie familiale. Tu travailles du lundi au dimanche et tu n’as pas de jour de repos. Tu es toujours en activité et quand tu rentres à la maison, tu ne décroches jamais. C’est compliqué et il faut trouver le juste milieu par rapport à la famille. C’est une organisation à avoir et pour l’instant, je ne suis pas super-bien organisé.»
Depuis trois mois, il cherche le bon équilibre et découvre différemment la relation entraîneur-entraîné. «Quand tu es entraîné, tu consommes. Tu n’as pas envie de réfléchir, tu t’entraînes deux heures et tu rentres chez toi. Mais quand tu entraînes, tu dois animer les séances et les mettre en place. Tu prépares le terrain, les chasubles, les ballons, etc. Et maintenant en tant qu’entraîneur, lorsque j’apprends à 9 h 30 qu’un joueur ne s’entraîne pas, je suis le premier à péter un câble. C’est vrai que j’ai consommé pendant de nombreuses d’années mais je n’imaginais pas le rôle de l’éducateur entraîneur comme ça.»
À 35 ans, il a connu un autre monde, une autre approche du métier, plus respectueuse. Soucieuse de l’être davantage que du paraître. De là à jouer les anciens combattants ou les ‘‘vieux cons’’ en condamnant la nouvelle génération? «Non, tout change et il faut évoluer mais il faut garder certaines valeurs intéressantes humainement. On ne peut pas tout interdire non plus. Ce n’est pas possible et plus on va interdire, plus ils braveront l’interdit. Ils aiment ça. J’ai la chance d’avoir des enfants ados de 15 et 18ans. Quand j’arrive au centre, les joueurs ont à peu près le même âge et cela me permet de les comprendre un peu mieux. À mon époque, on ne bougeait pas une oreille au centre de formation. Maintenant, c’est différent et il faut vivre avec son temps en gardant quand même cet esprit à l’ancienne qui était intéressant.»
Julien Ielsch a toujours eu cette capacité à s’adapter à son environnement et il a une idée bien précise et intéressante de ce que doit être un centre de formation: «Avant de former de bons joueurs de foot, il faut avoir de bons mecs. Un gamin, séparé de sa famille, a besoin qu’on poursuive son éducation. Ses parents lui en ont donné une pour être un bon gamin et là, c’est une tranche d’âge où ils deviennent des hommes. On est là pour les guider, les mettre sur de bons rails. À nous de faire en sorte, lorsqu’ils sortent du centre de formation, d’avoir formé de bons joueurs et surtout de bons mecs.»

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