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Entre polar et fantastique, Peeters et Lehmann entrent dans la légende

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L’homme gribouillé, Serge Lehmann (scénario), Frederik Peeters (dessin). Editions Delcourt, 320 pages, 30 euros.

Paris 2015, Betty Couvreur, une séduisante femme célibataire d’une quarantaine d’années, travaillant dans le monde de l’édition, vit avec sa fille adolescente Clara, qu’elle élève seule, et dans l’ombre de sa mère Maud, un auteur à succès de la littérature jeunesse. Elles vivent toutes trois dans l’appartement de cette dernière, formant un foyer exclusivement féminin. Le personnage fort et excentrique de Maud domine cette petite tribu matriarcale où Betty tente d’exister.

D’où peut-être son problème d’extinction de voix dès qu’elle ressent une émotion forte ? Malgré tout, des liens profonds unissent les deux femmes et la fille jusqu’au jour où débarque un personnage au physique inquiétant, mi-homme mi-corbeau. Cette créature terrifiante prétend vouloir récupérer une enveloppe ayant appartenu à Maud et détenant de terribles secrets. Le même jour, cette dernière tombe dans un coma profond. Betty Couvreur et sa fille Clara doivent alors résoudre cette énigme mystérieuse, qui les mènera jusqu’au fin fond du Doubs, dans la région de ses ancêtres. Ce road-movie, dont le chemin sera parsemé de cadavres et de découvertes invraisemblables, se transformera alors en quête initiatique sur leurs origines.

Serge Lehman, scénariste et écrivain de science-fiction (La guerre de sept minutes, La brigade chimérique…), et le dessinateur de BD Frederik Peeters (Pilules bleues, Lupus) ont écrit à quatre mains ce thriller fantastique s’étirant sur 320 pages. Un projet ambitieux et fou mais réussi. Comme dans un bon polar, le lecteur est d’emblée capté par le suspense haletant de cette intrigue, où se croisent des rabbins orthodoxes avec des gardes du corps peu orthodoxes, un homme à six doigts, un psychopathe à tête d’oiseau, des scientifiques-chercheurs un peu spéciaux et le Golem !

Au dessin, Frederik Peeters sublime ce scénario, avec sa palette graphique en noir et blanc et gris, qui n’est pas sans rappeler la patte d’un Tardi, Comes ou d’un Munoz, maîtres du genre de la BD noire. Il décrit parfaitement l’ambiance inquiétante de la ville sous une pluie torrentielle, où la violence peut frapper à chaque instant (comment ne pas penser aux attentats ayant ensanglanté la capitale l’année où se déroule le récit ?) ainsi que la campagne jurassienne et ses mystères. Son découpage dynamique, alternant entre gaufriers et cases pleine page, restitue parfaitement la tension du récit. Et que dire du personnage central et mystérieux à l’aspect angoissant à qui le titre renvoie ? Ce anti-héros devrait à coup sûr avoir sa place parmi d’autres génies du mal de la littérature.

Si le final pourra en déconcerter certains, L’homme gribouillé est à coup sûr une réussite tant graphique que scénaristique qui n’est pas sans rappeler l’œuvre de Fred Vargas. Entre roman noir et fantastique, ce livre devrait compter parmi les albums du genre.

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