
Le 13 mars 2016 à 16 h 15, Christophe est contrôlé sans carte de pêche, canne à la main, à l’étang communal de Long. Le garde, un prénommé Hervé, prend son identité. Quinze jours plus tard, à la fédération de pêche de la Somme, on examine les PV dressés dans les dernières semaines. Et là, on tique… « Quand j’ai vu que le procès-verbal avait été dressé non par Hervé, mais par Pierre, j’ai su qu’il y avait un problème. Moi-même, j’étais au thé dansant que son association avait organisé le même jour à la salle des fêtes d’Abbeville ! se souvient Michel, le président de la fédération départementale. J’ai donc convoqué Hervé pour qu’il s’explique ». Pour tout arranger, on découvre que le shérif d’eau douce, s’il exhibe volontiers un panneau à en-tête de la fédé, n’est plus assermenté depuis plus d’un an !
Le jour dit, Hervé se présente en compagnie de Pierre qui le prévient d’emblée : « Dis qu’on était ensemble ! » Hervé, décrit comme « fragile», est un peu perdu. « Euh oui… Il était avec moi. » Le président départemental le prévient : « Attention, un faux témoignage, c’est grave ». Hervé craque vite : « J’étais seul. C’est Pierre qui a rempli le PV le lendemain. Y’a une magouille. Je ne sais pas pourquoi, peut-être pour se faire bien voir… » Pierre ne supporte pas cet aveu, il s’énerve, se prévaut de son appartenance à la franc-maçonnerie (on cherchera en vain le rapport) et annonce que « la tête coupée », il niera toujours qu’il était à Long le 13 mars 2016.
À la barre, trois ans plus tard, visage rouge, fine moustache et culottes de velours, il n’en démord pas : « Oui j’étais au thé dansant, mais Hervé m’a appelé vers 15 heures. Il faut savoir que 80 % des gardes sont incapables de remplir un PV. Je me suis donc rendu à Long. Hervé s’est laissé embobiner pour me nuire » . Et le pêcheur verbalisé ? Il ferait donc partie du complot ? Il y a quelque chose de pathétique à voir cet homme respectable mentir comme un sale gosse, mentir au point que son avocat Me Crépin ne soutiendra même pas cette thèse dans sa plaidoirie. « Il a voulu donner un coup de main d’une manière extrêmement maladroite », plaide l’avocat. « Un garde est tout de même un chargé de mission de service public », rappelle le juge, qui, après lui avoir demandé de « ne pas noyer le poisson » (!) condamne le sexagénaire à un an d’interdiction d’exercer la fonction de garde et deux ans d’inéligibilité.
L’article Au bal et à l’étang est apparu en premier sur Courrier plus.