
Peut-on décrire autrement la phrase de Logan, 25 ans, lors de sa comparution pour violences et menaces de mort sur sa mère : « Quand je parle de ma vie, ça me pique un peu au cœur ». Ça change heureusement de « Je vais te tuer, je vais te crever, je vais t’égorger », mots lancés à la face de sa génitrice, le 7 juillet dernier. Mais il prévient : « J’ai dit ‘‘Je vais te tuer’’ mais jamais je ne toucherais à ma mère. En fait, ma mère et moi, on s’aime beaucoup. Vivre sans ma mère, c’est impossible ».
Elle est assise au premier rang, celui des victimes. Elle ne demande pas un centime mais plutôt la clémence des juges : « Si on laisse Logan en détention, c’est la fin ».
La violence, c’est un coup sur le tibia, accidentel selon elle et lui. À vrai dire, il ne pensait jamais se retrouver au tribunal. Comme il a déjà été condamné 24 fois, Logan est suivi par le SPIP (service de probation et d’insertion). Sa mère s’est spontanément adressée à lui après une nouvelle dispute violente, « mais pour qu’ils nous aident, pas pour le mettre en prison ». Sauf que vu son pedigree, les fonctionnaires ne pouvaient faire autrement que d’alerter la justice.
En théorie, une incarcération en guise de 25 e mention est inéluctable. C’est l’histoire de sa vie – celle qui pique un peu au cœur – qui va l’en sauver. « J’ai eu Logan à 17 ans, j’étais très jeune. Il a été élevé par mes parents, puis par son père, et après il a été placé. Je ne l’ai récupéré qu’à 9 ans » , se souvient sa mère, qui ajoute, fataliste : « Il a été en IME, il a fait des bêtises, de la prison… »
Ces bêtises tiennent souvent de la provocation : mettre le feu à une cellule dans le but de déménager (il le sera, en effet, au mitard), menacer d’un attentat islamiste (ce qui lui vaut d’être fiché S), insulter son juge de la détention (« Je savais pas que le micro était ouvert », s’excuse-t-il).
On comprend mieux : « Quand j’étais chez mon père, sa copine, elle m’aimait pas. Et son frère, il m’a fait… (Logan bégaie, le mot ne sort pas.) Quand elle m’a vu avec mon pantalon baissé, elle a même rien dit ! Après ils m’ont placé. »
Malgré le filtre de la visioconférence depuis la maison d’arrêt, l’émotion recouvre la salle 105 du palais de justice. La procureure intervient doucement : « Vous pouvez encore porter plainte, monsieur ».
L’adulte récidiviste devrait dormir en prison. C’est l’enfant blessé qui n’écope que de 80 heures de travail d’intérêt général.
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