A.D. after Death, Scott Snyder (scénario), Jeff Lemire (dessin). Editions Urban comics, 264 pages, 22,50 euros.
Dans ce futur indéterminé aux allures d’éternel présent, la mort a été vaincue, après que le gêne du vieillissement a été isolé. Une minorité de privilégiés en bénéficie désormais. Tous vivent dans un “refuge” au sommet des Andes, isolé et protégé du reste de la planète qui a dépéri et demeure sous un épais brouillard électro-magnétique. Seul inconvénient, ces immortels ne peuvent procréer et leur mémoire s’efface au bout d’un siècle. Jonah, voleur émérite à qui l’on doit en partie le remède de l’immortalité, a cependant décidé de reprendre son journal. Et de remettre en cause tout ce système qu’il rejette désormais.
Rencontre au sommet de deux grands noms du comics US: d’un côté Scott Snyder, qui a oeuvré sur Batman, recréé un croquemitaine contemporain (dans Severed) et s’est déjà attaqué à de la SF au long cours dans le très bon The Wake ; de l’autre, Jeff Lemire (à qui l’on doit la sublime série Descender). Les deux amis se sont retrouvés pour cet étrange ouvrage hybride, moitié album de BD, moitié récit romanesque, réparti en trois “livres”, comme autant de carnets intimes de Jonah. Ceux-ci débutent en 1982, lorsque Jonah, âgé de six ans, se remémore son premier souvenir marquant: un ballon de baudruche vert, aperçu lors d’un voyage en Floride, dérivant depuis New York. Et le journal se poursuit ainsi jusqu’au “présent” du futur, séquence courte et passablement incompréhensible au départ, qui va prendre son sens à la lecture des carnets.
La forme est donc singulière. Un brin aride également, d’autant que le dessin de Jeff Lemire n’est pas non plus très attirant. Et le fond du propos demeure longtemps hermétique. Mais pour qui se sera accroché et sera parvenu au bout des quelque 264 pages, la fin dévoile une réflexion mélancolique et prenante sur la vie, la mort. Et ce double désir, difficile à concilier entre le rêve de ne pas vieillir et celui de se souvenir pleinement de son existence.
Le genre d’ouvrage qui ne se lit pas forcément avec plaisir, mais qui reste étrangement marquant dans les esprits.
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