Révolution, tome I: liberté, Younn Locard et Florent Grouazel, Actes Sud, collection L’an 2, 328 pages, 26 euros.
« Depuis l’été dernier, le Roi de France, dans le but d’assainir les finances du Royaume et de lever de nouveaux impôts, s’est résolu à convoquer un organe de consultation inusité depuis 1614 : les Etats Généraux ». Voilà, ça commence par la, l’acte fondateur de cette incroyable histoire dans laquelle nous nous plongeons. Un peu de contexte tout de même : les nobles règnent en maitre sur la France depuis 1400 ans, le clergé n’a jamais été aussi riche, et tout le reste de la population est affamée. S’ensuit l’affaire Réveillon, les soldats étrangers, la bastille…, bref vous connaissez tout ça par cœur ! Vos cours d’histoire sont gravés à jamais dans votre mémoire et vous êtes incollables au Trivial Pursuit et à Question pour un Champion lors qu’il s’agit de la Révolution française.
Si c’est votre cas, vous ne pouvez pas passer à côté de cet ouvrage, et la postface signée par Pierre Serna, professeur d’histoire de la Révolution française, vous convaincra bien mieux que moi de l’intérêt d’un tel travail. Ce premier tome vous fera assurément voyager à travers les yeux des bourgeois et des pauvres, des courageux et des peureux, des journalistes et des imprimeurs, des généraux et des trouffions. Tout le monde y passe dans cette fresque fleuve au rythme dantesque et dont l’exactitude historique, à travers les yeux de personnages célèbres ou inconnus, donnera une bouffée d’air frais aux connaisseurs.
Si vous êtes moins intéressés par le sujet, ruez-vous tout de même sur cette bande-dessinée : pas besoin de lire les 328 pages de ce tome pour comprendre qu’on tient entre les mains une des pépites de cette année. Il suffit en fait de tomber sur la première double page pour en être convaincu, pages 46-47, son silence, sa beauté… On sent presque les rayons du soleil couchant nous caresser le visage. On en prend plein les mirettes, avec ces dessins clairs mais pas trop, précis mais pas trop, furieux mais pas trop.
Le rythme est bon, les coupures et enchainements entre les différentes histoires de chaque protagonistes suivis sont clairs et on se laisse allègrement guider. Le niveau de détail est au rendez-vous, les parisiens apprécieront de reconnaitre les bâtiments historiques de la capitale. Chaque case est mûrement réfléchie et indispensable, même dans les scènes de nuit où l’atmosphère retranscrite est juste et palpitante.
C’est d’autant plus remarquable que cet album a été écris alternativement par les deux auteurs. On peine à le croire en essayant de distinguer les deux traits tellement ils sont proches. Locart et Grouazel nous livrent une œuvre majeure de cette année 2019. On a beau chercher un défaut a cet album il n’en vient pas, même sa longueur est un bonheur et on en redemande.
Deux autres tomes sont à suivre pour ce qui s’apparente aujourd’hui à une trilogie annoncée. Sachant que cet album a pris cinq années de travail, il va surement falloir s’armer de patience pour dévorer la suite.
L’article 1789 comme jamais ! est apparu en premier sur Courrier plus.