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Prise de tête à la cour d’assises

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Quatre jours de descente, Grégoire Bonne. Editions Mosquito, 72 pages, 18 euros.

Voilà un premier album qui s’impose. Et un nouvel auteur qui réussit son entrée dans le monde du 9e art, avec un récit oscillant entre histoire de procès et fantastique.

Charles Mirmetz a été désigné juré d’assises. pour une affaire de meurtre entre deux revendeurs de pièces de voitures volées, dans ce qui semble être une cité du Nord, sombre et pluvieuse. Un dossier à la fois banal et glauque mais où l’accusé, Salesky, un immigré polonais, risque sa tête, en cette France provinciale des années 60.
Scrupuleux et consciencieux, et bien que venant d’être frappé par la mort accidentelle d’un de ses fils – mort dans laquelle sa « responsabilité est engagée – Mirmetz va s’investir pleinement dans son rôle. Il va aller jusqu’à refaire l’enquête et être hanté de visions prophétiques troublantes, qui paraissent a contrario innocenter Salesky.

Les récits de procès ne manquent pas. Hollywood en a même fait un genre à part entière, depuis l’emblématique 12 hommes en colère, dans lequel Henri Fonda, par sa démonstration et sa verve de son discours parvient à renverser l’opinion du jury. C’est ce que tente de faire aussi ici Charles Mirmetz. Mais cet argumentaire restera hors champs. Le récit de Grégoire Bonne se concentre plus sur la psychologie, voire la folie progressive de son personnage, tirant le récit vers un certain fantastique onirique, suggéré d’entrée par le témoignage halluciné d’un témoin croyant voir le diable dans l’accusé.

Un récit d’ambiance, donc, tout en clair obscur, porté par un style graphique singulier et une technique en noir et blanc très expressive, au pastel sec, qui joue sur les ombres, et crée une ambiance nébuleuse, inquiétante et fantastique. Une atmosphère déjà visible dès la belle et très immersive couv’ de l’album.

Sans être totalement prévisible, la fin lève le mystère de façon un brin trop exemplaire et attendue sans doute. Avec une pointe d’ironie tragique qui fait basculer le récit définitivement du coté du conte moral (ou amoral vue l’ultime case). De quoi désamorcer un peu la réflexion sur le rôle et la responsabilité du juré d’assises, mais pas de faire perdre le plaisir du récit, ni de son effet graphique et visuel marquants.

Des qualités qui ont déjà valu à l’album et à son auteur le prix Bulles de sang d’encre au festival du polar de Vienne (Isère).

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