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Clik here to view.Maïdan Love, tome 1: Olena, Aurélien Ducoudray (scénario), Christophe Alliel (dessin). Editions Grand Angle, 56 pages, 14,90 euros.
Février 2014, l’Ukraine s’embrase de nouveau. L’espoir de liberté et de modernité née de la “révolution orange” des années 2000 s’est évanoui. Les tensions augmentent entre pro-Russes et pro-occidentaux sur fond de cynisme face à la corruption généralisée.
Alors que sa petite amie, Olena, doit entrer à l’université à Kiev, Bogdan se résout lui à intégrer les forces antiémeutes, les “berkout”, afin de pouvoir gagner suffisamment d’argent pour prendre un appartement en commun.
Mais alors que le gouvernement refuse de ratifier un accord d’association avec l’Union européenne, la contestation se cristallise sur la place Maïdan. La place centrale de Kiev devient, comme dans d’autres pays, une zone autogérée de contestataires. Une situation que l’Etat ne peut plus tolérer. Même s’ils sont encore en formation, les membres de l’unité de Bogdan sont appelés en renfort. Alors qu’ils se rendent sur place, Bogdan reçoit un message d’alerte d’Olena. Il n’a alors plus qu’une idée: retrouver d’urgence sa petite amie, apparement devenue une ardente activiste du Maïdan. Quitte à enfreindre les ordres. C’est le début d’une course-poursuite où le futur berkout va se voir propulsé, plus ou moins sans l’avoir voulu, dans l’autre camp.
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Journaliste de formation, Aurélien Ducoudray excelle à dépeindre une réalité sociale à travers des récits emplis d’humanité et d’empathie. Avec un tropisme particulier pour l’Europe de l’Est, ou plutôt l’est du continent européen, comme dans son beau diptyque Amère Russie ou Les Chiens de Pripyat.
Il retrouve d’ailleurs ici le dessinateur Christophe Alliel et son trait semi-réaliste dynamique (un dessin qui éclate d’entrée dans une double page plongeante sur la place Maïdan en pleine effervescence révolutionnaire).
Cap à l’Est de nouveau, donc. En se confrontant cette fois à une réalité historique plus proche et nettement plus sensible que les suites de Tchernobyl ou les soldats russes en Tchétchénie. Une histoire qui n’est pas finie, puisque la révolte s’étant installé place Maïdan voilà quatre ans est à l’origine des conflits qui continuent de déchirer l’Ukraine. Et une histoire, surtout, dont les interprétations sont toujours sujet à polémique.
Sur ce point, Maïdan Love se montre habile. En une planche (ci-dessous), Olena résume bien la situation et désamorce l’opposition simpliste entre idéalistes béats à la BHL voyant dans le mouvement de Maïdan des pro-Européens libéraux à défendre à tout prix et pro-russes montrant surtout les franges clairement fascistes qui s’y trouvèrent. Et, tout au long de ce premier tome, ces différentes positions vont s’afficher, mais de manière plus complexe. Et surtout, de façon très incarnée.
En quelques planches d’exposition, là encore, les personnages prennent chair, qu’il s’agisse d’Olena, de Bogdan, ou de la “bimbo” Yvana, qui provoque la jalousie d’Olena avant d’être redécouverte en infirmière courageuse alliée de Bogdan. Même le capitaine berkout, anti-héros de l’histoire, a une carrure et de l’épaisseur. L’idée de mêler une quête amoureuse à l’arrière-fond politique apporte aussi une part indéniable et réussie de romanesque à cette aventure menée à un rythme haletant (Aurélien Ducoudray avoir eu en tête Afters Hours, le film de Scorcese).
En tout cas, à la fin de cette première partie, plongé en plein coeur de l’action – avec un dernier dessin pleine page en guise de beau cliffhanger – on a hâte de savoir si Bogdan retrouvera bien Olena.
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L’article Maïdan, place de l’amour pour Ducoudray et Alliel est apparu en premier sur Courrier plus.