
« Il y avait aussi un peu de lassitude dans le couple, objecte Alain, mais c’est vrai, j’y ai passé de plus en plus de temps » . Elle le suspecte de chercher à faire des rencontres. Lui se défend : « Au début, ce n’était pas vrai du tout mais j’ai fini par aller sur des sites… »Il mène une double vie, et pas que virtuelle. En 2009, il part avec une femme rencontrée sur la toile mais son gamin le prend très mal et il revient trois ans plus tard dans un foyer devenu incandescent, où sa femme, échaudée, le suspecte de toutes les turpitudes. En 2015, il clique de plus belle et claque définitivement la porte.
Commence un divorce tumultueux. Madame épluche l’ordinateur et tombe sur d’immondes photos et vidéos d’enfants, abusés sexuellement. La présidente du tribunal met les points sur les i : « C’est regarder des enfants se faire violer, Monsieur. Les fichiers s’appellent Tara 8 ou Nina 4, on sent bien qu’on ne parle pas de fruits et légumes ou de voitures ».
Alain, 51 ans, est à la fois rouge de peau et au bord des larmes. Il pleurerait du sang que ça ne surprendrait personne. « J’ai discuté avec une femme sur Coconut qui m’a proposé de m’envoyer des photos sur Skype. J’ai cru que c’était des photos d’elle. Quand j’ai vu que c’était des enfants, j’ai regardé par curiosité puis j’ai tout fermé. J’ai même menacé la femme de la dénoncer. Mais c’est vrai, je ne les ai pas jetées… Après, l’ordinateur est tombé en panne, je n’ai plus vu les fichiers, j’ai cru qu’ils avaient disparu… »
Alain est inexcusable, mais Alain fait pitié. Il a perdu son boulot, vit en logement social : « Je n’arrive pas à me projeter, j’attendais cette audience… Ces images, c’est horrible. Je n’ai pas réagi comme il le fallait à ce moment-là » . Il a retrouvé une formation, fait du bénévolat dans une association caritative. « C’est vrai que vous êtes décrit par tout votre entourage comme quelqu’un de bien », atteste la présidente.
Le monde est devenu tout petit et pas forcément plus beau. Il y a trente ans, Alain se serait fait choper avec un magazine de charme dans son garage et sa femme aurait fait le nez pendant un mois ; en 2015, Alain a commis un délit grave : il est condamné à six mois de prison avec sursis.
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