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Le Rapport W au coeur de l’enfer d’Auschwitz

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 Le rapport W, infiltré à Auschwitz, Gaëtan Nocq. Editions Daniel Maghen, 250 pages, 29 euros.

C’est une réalité historique et un épisode stupéfiant de la Seconde Guerre mondiale que Gaëtan Nocq évoque ici. Et, plus précisément, comment un résistant polonais, membre de l’armée intérieure polonaise, a réussi volontairement à se faire enfermer à Auschwitz en 1940 ! Là, sous une fausse identité, il met en place un réseau de résistance, blocs par blocs. L’objectif est de provoquer un soulèvement dans le camp, mais l’ordre de ses supérieurs n’arrivera jamais, ni le soutien attendu de Varsovie.

De plus en plus cerné, Witold Pilecki, parvint finalement à s’évader au printemps 1943. Il aura survécu 943 jours à ce camp de la mort. De cet engagement extrême, il va réussir à produire plusieurs rapports, le fameux “rapport W” du titre ; informations qui n’auront pas grand effet sur les Alliés…

Survivant d’Auschwitz, Pilecki sera arrêté par le nouveau régime stalinien en 1947 et fusillé en mai 1948, accusé d’espionnage.

Après deux récits immergés déjà dans les guerres du XXe siècle, Soleil brûlant en Algérie sur la guerre du même nom d’Alexandre Tikhomiroff et Capitaine Tikhomiroff, sur les aventures de son aïeul pendant la révolution russe, Gaëtan Nocq replonge une nouvelle fois dans l’histoire tragique. C’est cette fois une rencontre avec une amie historienne, Isabelle Davion, qui l’a mis en contact avec le sujet (elle réalise d’ailleurs une longue postface à l’album, présentant le rapport W). Un sujet qui, forcément, avait de quoi impressionner, face à cette nécessité de se confronter à l’indescriptible horreur des camps de concentration nazie.

Gaëtan Nocq s’en saisit par une approche pointilliste, épurée, par petites touches, toujours centré sur son personnage et sa mission. Et il restitue l’univers d’Auschwitz au crayon et à travers des pages très contrastées, en aplats de couleurs. Le résultat est moins émouvant et prenant que ses deux précédents albums, mais cette retranscription méticuleuse et glaçante parvient à faire découvrir très factuellement une autre vérité, assez inédite, sur les camps. Sans pathos et sans surenchère. Il dévoile aussi, à travers tous ces résistants anonymes, masqués derrière une identité cryptée, une incroyable énergie et vitalité humaine au coeur même de l’enfer. Que toute cette action assez incroyable n’ait finalement servi à rien ne fait qu’ajouter une lourde ironie tragique à l’histoire.

Volontairement effacé de l’histoire après-guerre, la mémoire de Witold Pilecki n’aura été réhabilité qu’au début des années 1990. Et son rapport publié en français qu’en 2014. Aujourd’hui, ce roman graphique, et sa superbe édition – comme toujours pour les albums Daniel Maghen – permet de lui redonner un autre éclairage méritoire.

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